14 nov. 2005

Conclusion : Ces moyens permettent-ils une nouvelle forme de communication ?


Certains semblent le croire… En témoignent les deux exemples suivants. Le premier est extrait d’un site Internet de prosélytisme chrétien ; on y trouve un article mentionnant l’initiative de la Société biblique australienne, qui a traduit la Bible en langage SMS, afin de pouvoir envoyer, via les SMS, des versets de ce livre sacré à de nouvelles catégories de population : « Le responsable des écritures saintes de la Société biblique, George Rodriguez, dont le fils Michael a passé six semaines à créer un texte électronique «branché» à partir de l’écrit poussiéreux, a déclaré à AFP: «C’est une étape logique. Notre objectif à la Société biblique est d’amener la Bible aux gens et voilà une façon très efficace d’y parvenir.» Site : http://www.topchretien.com/topinfo/affiche_info_v2.php?Id=9734

Dans un autre genre, voici un article qui expose l’initiative de la société Pages jaunes (annuaires téléphoniques) : il est désormais possible d’effectuer une recherche de coordonnées en utilisant le langage SMS : « Discret coup de pub ou volonté réelle d'ouvrir ses pages à tous ? Le site des Pages Jaunes a en tout cas adopté un nouveau "langage" : le SMS. On pourra avec lui interroger son moteur de requêtes en toute quiétude. Certains diront que l'initiative est bien pratique pour ne pas laisser ses adeptes sur le bas-côté. D'autres, ardents défenseurs de la langue, tiqueront un peu plus... Mais qu'importe, le service est en place. » Source : http://www.blogger.com/

Christine

Christine vient d'évoquer l'usage du langage SMS dans la publication d'informations pas franchement neuves ! Pour ma part, c'est le genre du blog lui-même dont je contesterai l'aspect novateur. Récit de vie, autobiographie, journal, correspondance, aujourd’hui blog, me semblent autant de mots pour désigner le fait de se raconter à la première personne du singulier.

L’intérêt scientifique pour les récits de vie se manifeste, lui, après la Première Guerre mondiale, aux États-Unis, par la création de l’école de Chicago et la publication, dès 1918, de l’ouvrage emblématique de W. Thomas et F. Znaniecki, The Polish Peasant in Europe and America, dont un livre est consacré à l’autobiographie d’un émigrant. L’école de Chicago, « fondatrice de la sociologie empirique américaine, préoccupée du développement de la délinquance urbaine dans son rapport avec l’immigration, fait du recueil de témoignages personnels – jusqu’à de longs récits de vie – son outil méthodologique privilégié. (1) » L’esprit de cette sociologie en action est encore à l’œuvre dans la grande enquête qui, de 1935 à 1943, permet de recueillir près de 200 000 pages de récits de vie, dont ceux de 4 000 noirs, nés dans l’esclavage.

Les objectifs de ce programme gouvernemental étaient de susciter l’émergence d’une nouvelle identité nationale et… de réduire le chômage des intellectuels, écrivains et étudiants, qui sont engagés dans l’opération de recueil des témoignages. Les ethnologues et les anthropologues travaillent aussi, des années 1930 à 1940, à faire du récit de vie des membres de minorités – pensons à l’autobiographie du chef hopi et à celle, fameuse, des Enfants de Sanchez (2) -, un genre promis à un bel avenir.

Le récit de vie va ensuite inspirer des disciplines aussi diverses que l’éducation, la formation des adultes, la thérapie, la sociologie clinique. On l’utilise dès lors pour arrêter de boire ou de fumer, pour réorienter sa vie professionnelle ou pour régler un conflit familial (3). Le récit de vie concerne donc nombre de disciplines, et que nous utilisions aujourd’hui le blog, avatar du récit de vie, comme outil pédagogique n’a rien de surprenant.

Les blogs sont une version « technologisée » et médiatisée des journaux intimes, les détenteurs de blogs y mettent beaucoup d’eux-mêmes et se lancent sur le Net comme on jette une bouteille à la mer après y avoir inséré un message qu’on a écrit pour être lu mais qui peut rester vierge de tout regard à jamais.

Tout d’abord apanage des adolescents qui y ont vu une manière numérique de s’exprimer facilement – en effet sur un blog, nul besoin d’être un concepteur médiatique pour renseigner ses pages, insérer des images ou créer un espace d’échanges et de communication où l’on est libre d’exprimer ses opinions, ses angoisses, ses douleurs, ses coups de cœur ou ses coups de griffe, mais aussi son humeur qui change au gré des heures, des jours ou des semaines –, les blogs ont évolué et sont aujourd’hui un outil de communication à part entière. Il y aurait actuellement entre 12 et 34 millions de blogs sur le net. Les hommes politiques mais aussi les organisations ont vu là un moyen de communication supplémentaire, alliant flexibilité et légèreté et ne nécessitant pas la présence d’experts en informatique pour effectuer les mises à jour ou les modifications à apporter.

Autobiographie ou stratégie de communication ? Espace de liberté d’expression ou aliénation technologique ? La lecture des blogs nous conduit à trouver tout et n’importe quoi et sous toutes les formes, des plus structurées aux moins conventionnelles avec un dénominateur commun, on écrit. Les nouvelles générations, entend-on dire sont celles de l’image…Certes, les enfants, les ados manient souris et autres joysticks ou manettes avec une dextérité déconcertante ; ils intègrent particulièrement rapidement les technologies de l’information et de la communication et flirtent souvent entre réalité et virtualité, alors pourquoi ce besoin de s’écrire ? De se lire ? De sentir qu’on peut être lu ? Besoin que l’on relève à travers les blogs, mais aussi à travers les SMS et autres messages. Un téléphone n’est-il pas conçu pour se parler à distance ? Et bien, non, les adolescents choisissent souvent l’écrit pour communiquer. D’ailleurs, si on craignait que la communication numérique fasse disparaître l’écrit, on se trompait.

Les nouvelles technologies de l’information et de la communication multiplient les écrits : des écrits que s’approprie une génération qui les fait vivre et évoluer comme elle, en transgressant toutes les règles sans complexe car le support numérique n’est pas une feuille de papier et supporte tout du meilleur au pire.

Nadine

Du côté des anglo saxons... blog, FOAD et histoires de vie. Proposé par Olivier :

(copié collé du site : http://mediatic.blogspot.com/2004/04/les-blogs-du-pass-au-futur.html)

Via Dave Winer. L'article de Nico Macdonald pour The Register : The future of Weblogging fait un point sur les propos tenus à la BloggerConference de ce week-end, à la Harvard Law School de Cambridge, Mass., Etats-Unis et donne une mise en perspective intéressante sur l'actualité et sur l'avenir des blogs.

Pour l'auteur de ce papier, l'émergence des blogs correspond à une expression hors ligne de désaffection dans l'organisation civique de la société pour un investissement en ligne à exprimer une opinion et un engagement. Les blogs développent un mode de confessionnal culturel qui rend publique les expériences privées de chacun et les pose en ligne en débat. Nico Macdonald affirme que les billets des blogs sont plus thérapeutiques (ou ont cette approche) pour l'auteur-éditeur du blog que dotés d'une vraie qualité informative pour l'internaute lambda. Cette intimité et cet aspect confessionnal mis en avant, le sont dans un cadre familial et amical, une micro-communauté de personnes.Le weblog n'a rien de révolutionnaire. Les CMS existent depuis des années tout comme le phénonème d'appropriation du Web par les pages personnelles. Le fait est que les weblogs ont été popularisés par des journalistes aux Etats-Unis (eux-même blogueurs et donc praticiens convaincus). La vision idyllique équitable des blogs mis à disposition n'a pas trop de sens, du fait qu'il existe désormais une élite de blogueurs dits "populaires" ; une tendance qui s'affirme de plus en plus. La prolifération du phénomène de l'auto-publication pose des questions en terme de classification et d'archivage de l'information. L'archivage est favorisé si chaque article possède un lien permanent (permalien) mais la contextualisation en une classification ordonnée de plusieurs billets de weblogs est une tâche ardue, sans doute facilitée par le "réseau" des "track-backs" - rétro-liens -, les systèmes de réputation et dans le futur une organisation plus perceptible des méta-données (surtout à plus grande échelle).Ainsi, il est nécessaire de pouvoir "visualiser" la blogosphère, en avoir des représentations schématiques pour en favoriser sa compréhension.

Une nouvelle forme de communication? Sans aucun doute oui. Les échanges humains n'ont jamais cessé d'évoluer. Cette évolution semble se situer au niveau d'une volonté à communiquer le mieux possible hors de la sphère interelationnelle directe. Le principe de base étant centré sur la nécessité de communiquer à distance en situation de danger ou de conflit. Rien d'étonnant, en fait, à ce que le plus souvent ces découvertes s'effectuent dans le domaine militaire.

Les nouveautés dans le domaine des communications résident dans le fait que progressivement la socièté civile s'empare de ces médias et les emploie de manières aussi diverses qu'elle peut l'être.

Les systèmes via internet offrent un espace toalament délivré des contraintes de l'interaction, spontanée ou différée, duelle puisque le monde entier est susceptible de participer aux échanges en cours. Cela ne peut que modifier profondemment les formes de communication. Il ne s'agit pas seulement des formes typographiques, orthographiques, morphologiques, syntaxique... ou plutôt ces bouleversements témoignent du déplacement intellectuel que ce système produit. C'est

certainement l'occasion aussi de voir apparaître des formes de civilités et d'être en socièté nouvelles.

Si les jeunes gens investissent cet espace avec enthousiasme, c'est qu'ils y trouvent les champs d'exploration dont ils ont besoin. L'Autre, duquel je me distingue est à portée de main, toujours disponible. L'observation n'est pas qu'angélique le systéme en tant que miroir du monde propose ses rencontres heureuses et ses drames.

Anne Adras

J'ai déjà répondu à cette question en (III,a), et je ne reviens pas sur mon idée que ces MSM, mails, blogs, etc. n'ont pas inventé une nouvelle forme de communication. Cependant, je suis d'accord avec Yacoub pour dire qu'il s'agit là d'une forme de langage, et donc avec ses aspects positifs et négatifs (Et nous ne parlons plus là de l'évolution d'une langue, mais de certains côtés d'un langage !). Par contre, même en étant une jeune chercheur en linguistique, je ne vois pas d'un mauvais œil tout ce qui peut enrichir notre langue, sans pour autant la dénaturer, la tuer (je me battais déjà au lycée pour l'intégration de certains mots anglophones dans notre belle langue française !). Je pense que nous ne pouvons pas, pour le moment, pointer exactement l'impact de ces phénomènes sur notre langue, nous sommes encore trop près de leur émergence et de leur magnifique essor. En ce sens, nous ne savons pas de quelle manière aborder ce problème (par le biais des abréviations, de la langue, du support… en témoignent les différentes questions ci-dessus). Et, je pense aussi que pour mieux le cerner (le problème), il faudrait une réelle étude linguistique, un travail complet abordant tous ses différents aspects...

Marion



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